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Mot de la réalisatrice

L’Hôtel-Dieu sera vendu, indiquait le journal La Presse, le 28 mars 2013. Cette annonce m’a semblé impensable. C’est la seule institution à Montréal qui a exactement l’âge de la ville. Jeanne Mance est venue à Montréal pour fonder un hôpital, et elle a fini par fonder la ville, avec l’argent de l’hôpital. Pour moi l’Hôtel-Dieu, c’est l’âme de Montréal.

Dans mon premier film La Folle entreprise, sur les pas de Jeanne Mance, je découvrais et je rappelais cette aventure montréalaise, je tentais de « dépoussiérer la mémoire » à travers le portrait d’une femme résolue et téméraire, à qui je m’identifiais l’espace d’un documentaire. Dans Le dernier souffle, j’ai souhaité « graver dans la mémoire » les derniers moments d’activité d’un des plus anciens hôpitaux d’Amérique à travers le regard de celles et ceux qui y vivent encore. Deux ans avant sa fermeture, j’ai voulu capter sa mémoire vivante et son âme avant qu’elles ne s’éteignent. Ces lieux, avec ses occupants qui l’investissent et le font vivre, sont au cœur de mon propos.

J’ai fréquenté l’Hôtel-Dieu chaque jour ou presque pendant ces deux années. Le temps a été mon allié. J’ai rencontré et filmé les médecins, les infirmières, les bénévoles, les préposés, les agents d’hygiène et de salubrité, les techniciens en bâtiment, les patients, les artistes engagés par l’Association des Auxiliaires-bénévoles et les religieuses. Je les ai suivis, je les ai observés. Je suis aussi devenue bénévole pour mieux comprendre le travail de relation d’aide auprès des malades. Des liens de confiance se sont noués au fil des jours. Le dernier souffle exprime ce quotidien formé d’images, de sonorités, de couleurs, de musique et de voix : celles de l’Hôtel-Dieu de Montréal.

J’ai voulu recréer, bien humblement, l’univers si particulier de l’Hôtel-Dieu où les histoires de ses derniers occupants prennent un relief particulier avec cette fermeture annoncée. Les Hospitalières poursuivent pour leur part leur travail mémoriel et patrimonial. Elles n’ont pas de relève. La dernière religieuse a fait ses vœux en 1967. Pour l’heure, elles continuent de transmettre à tous ceux de l’Hôtel-Dieu leur tradition de soins portés aux malades et de respect du passé.

Dès mai 2014, à la fois impliquée et observatrice, j’ai amassé mon matériel et écrit le film en même temps. L’écriture s’est poursuivie au montage sur une période de dix mois. Enfin, j’ai voulu apporter une attention particulière à la conception sonore et à la musique, composée sur mesure, pour laisser entendre le souffle de cette institution vieille de 375 ans.

– Annabel Loyola

Photo : Denis-Carl Robidoux